Beaucoup des questions, pour certaines inédites, sont posées à l’heure numérique.
Le droit du travail actuel est insuffisant pour protéger de la logique du moins-disant social qui est le dénominateur commun de tous ces risques. Combattre le modèle low-cost est le fil rouge de notre action syndicale, comme nous l’avions décidé lors du 17ème Congrès de l’Ugict-CGT. Pour cela, il est nécessaire d’obtenir de nouveaux droits pour toutes les travailleuses et tous les travailleurs.
Dans le même temps, ces évolutions fortes nous donnent l’opportunité de réinterroger nos modèles économiques et de management devenus archaïques. Changer de cap nécessite de rompre avec le modèle capitalisme et le Wall Street management en restaurant les logiques propres au service public, à l’intérêt général à la cohésion et l’égalité sociale. Force est de constater l’absence de débat démocratique sur les enjeux de cette révolution numérique déjà entamée. Il est nécessaire d’anticiper notre avenir en organisant la mobilisation des salarié-e-s sur les attentes exprimées et nos propositions syndicales afin de ne pas rester spectateur des évolutions.
Sans une mobilisation forte nous risquons de tomber dans le scénario low-cost, alors que paradoxalement le numérique nous ouvre des possibilités d’émancipation pour le monde du travail.
Évolutions numériques : négociations en entreprise
L’état d’esprit des salarié-e-s de l’encadrement est majoritairement favorable aux évolutions liées au numérique et exprime des attentes vis-à-vis de ces évolutions (sondage 50 ans de l’APEC14, LabSocial d’Humanis15 etc.), même si on note une dimension ambivalente liée aux craintes pour l’avenir.
Ces évolutions, même si elles ont commencé et s’annoncent rapides et de grande ampleur, ne sont pas encore écrites. Elles seront fonction de ce que nous serons en capacité de porter pour construite le numérique autrement.
Nous pouvons nous appuyer sur la réussite de notre campagne sur le droit à la déconnexion et sur l’accueil favorable réservé à nos propositions pour construire le numérique autrement. Comme en témoigne le résultat du galop d’essai que nous avons fait avec notre dernier baromètre Ugict-CGT/Viavoice 2016.
Pour aborder la révolution numérique, êtes-vous d’accord avec les propositions suivantes ?
À l’heure où les entreprises s’organisent pour se transformer, il est nécessaire que nous soyons présents pour peser sur les choix qui détermineront le contenu des évolutions. Un objectif accessible, comme le démontrent les avancées obtenues dans certains accords, et notamment le seul accord portant sur la transformation numérique d’un grand groupe, celui d’Orange, en septembre 2016.
Campagne « Construire le numérique autrement »
Référence syndicale sur le numérique, l’Ugict-CGT a été retenue il y a 6 mois par l’ANACT pour son projet sur la Qualité de vie au travail & le Numérique.
Ce projet pour l’ANACT alimentera notre campagne « Construire le numérique autrement » qui repose sur cinq axes :
Le vécu au travail
Notre projet part de l’environnement de travail, de l’évolution du contenu du travail et des conditions d’exercice professionnel. À ce titre, nous réalisons des « Entretiens experts » pour concevoir les différents outils du projet. Ces « Entretiens experts » sont collectifs et par métier. Ils sont réalisés dans les branches et les entreprises les plus impactées par le numérique : édition, journalisme, télécoms, banque, assurance, énergie, industrie et services.
Les verbatim issus de ces entretiens ainsi que la synthèse interprofessionnelle de ces entretiens seront publiés sur le site XXX et permettent, au-delà des discours et slogans sur le numérique, de démontrer les contradictions que ces transformations génèrent sur le terrain. Un questionnaire pour permettre de faire, avec les salarié-es un diagnostic sur l’impact du numérique sur la qualité de vie au travail est également mis à disposition, au format web et papier. C’est un bon outil pour mettre le vécu des salarié-es et leurs aspirations au cœur de la négociation qualité de vie au travail.
Propositions interprofessionnelles
La DATA de ces entretiens experts nourrit le contenu du travail de l’Ugict-CGT, et en particulier du groupe « ICT & numérique » qui a travaillé pendant un an à la construction des propositions pour les différents axes revendicatifs de la campagne. L’idée est d’ouvrir le débat avec les ICT sur ces propositions , en leur permettant de donner leur avis et de les compléter. L’objectif est de montrer que nous ne sommes pas contraints à subir les transformations, mais que nous pouvons au contraire, peser sur le sens et sur le contenu de la révolution numérique. Ces propositions ont vocation à être complétées et précisées au plus près des réalités professionnelles. Au vu de la rapidité des transformations, elles seront enrichies progressivement à partir des nouvelles questions et des retours d’expériences. Elles ont vocation à être portées au niveau national, dans les branches et les entreprises, et à déboucher sur des avancées concrètes.
Pour construire le numérique autrement et ouvrir le débat avec les ICT, l’Ugict-CGT met à disposition 24 propositions interprofessionnelles adaptable aux réalités des professions, des territoires, des entreprises et administrations. Ce modèle de consultation est construit autour de 24 propositions à voir ici.
Le label « Construire le numérique autrement »
Les transformations numériques sont rapides, variées et s’exercent à toutes les échelles. Pour « construire le numérique autrement », il faut donc travailler des propositions au niveau des filières professionnelles, des bassins d’emplois, des entreprises et des réalités de travail. Le label « Construire le numérique autrement » doit donc permettre aux équipes syndicales de construire leur campagne avec des revendications concrètes, à partir de leurs réalités professionnelles et des aspirations des salariés, en utilisant et déclinant les outils de communication. Le site web leur garantira une visibilité et permettra de faire converger les revendications professionnelles ou territoriales.
Investir le Syndicalisme 2.0
Comme l’a écrit Ignacio Ramonet en 2011 dans son livre « L’explosion du journalisme », l’ère des médias de masse cède la place à la masse des médias. Les réseaux sociaux représentent les médias alternatifs aux médias officiels tenus par le capital.
Et sociologiquement, ce sont les jeunes diplômé-e-s, c’est-à-dire celles et ceux qui représentent potentiellement l’avenir de notre syndicalisme, qui utilisent le plus les réseaux sociaux. Dans l’ordre Facebook, Snapchat, Twitter,…
Les technologies nous donnent l’opportunité de construire un tout autre modèle en rupture avec l’idéologie et le modèle capitaliste dominant. En ouvrant des possibilités inédites de partage des savoirs et de l’information au sein d’organisations collectives libres, car indépendantes du système dominant, les technologies numériques peuvent être vecteurs de transformation de la société et du rapport au travail.
Pour y parvenir, nous devons accélérer les transformations de notre syndicalisme :
• un syndicalisme qui s’ouvre aux contributeurs indépendants.
• Un syndicalisme qui crée de nouveaux droits et protections du salariat.
• Un syndicalisme qui réfléchit à transformer ses structures pour développer une vie syndicale collective afin qu’il n’existe aucun syndiqué isolé, permettre en particulier à des cadres dirigeants d’échanger et de mutualiser expériences, réflexions et actions.
• Un syndicalisme 2.0 qui ne se borne pas à sa présence sur les réseaux sociaux, mais capable, par exemple, de construire des plateformes permettant aux organisations syndicales, dans les entreprises donneuses d’ordres et les organisations syndicales, dans les entreprises sous-traitantes, de se contacter, de mener des batailles pour imposer de nouvelles relations de coopérations et de cotraitances, de responsabilisation sociale des donneurs d’ordres. Une syndicalisation 2.0, outil de mutualisation, d’expérience et de luttes syndicales.
Syndicoop, la plateforme syndicale et coopérative
L’Ugict a lancé une expérimentation appelée Syndicoop, plateforme syndicale et coopérative. La plupart des UFICT et de nombreux syndicats ont inscrit leurs militants à ce réseau hybride qui a pour ambition de mélanger outils et réseaux militants, espaces de collaboration et de partage, plateformes de publication et de mobilisation, et mutualisation d’informations et de ressources.
Concrètement, Syndicoop est un portail commun à plusieurs centaines de responsables d’organisations : outre un annuaire très complet, de nombreuses applications permettent de mettre en commun des documents, informations, publications ou initiatives, notamment via des «coopératives».
Cette communauté militante en ligne est une réponse aux tentations « d’Uberisation » et de dispersion des modes d’organisation et d’actions collectives, voire de la représentation des salariés. Parce que nous ne croyons pas au syndicalisme par délégation, nous nous emparons donc du numérique pour accélérer « l’empowerment militant ». Ce terme traduit une vision dans laquelle les syndiqués sont acteurs, auteurs et décideurs. L’objectif de Syndicoop est donc d’utiliser le numérique pour prolonger notre engagement, renforcer les structures de la CGT, et fluidifier l’exercice des responsabilités syndicales.
Comme beaucoup d’autres, le site lenumeriqueautrement.fr est par exemple hébergé sur cet espace commun, ce qui facilite la mise en place de sa dimension partagée et participative. Vous y trouverez également une revue de presse du numérique. Très complète et actualisée, «Numer’Action», est éditée par la Fédération CGT des Sociétés d’Études, et fournit une démonstration concrète d’une manière de construire #LeNumériqueAutrement.
Des outils pour nos syndicats et nos IRP
Des outils pour aller au débat avec les salarié-es
- 24 propositions « Construire le numérique autrement ».
- Un diagnostic pour évaluer avec les ICT l’impact du numérique sur leur qualité de vie au travail, disponible en septembre 2017.
- Blog de campagne « Le numérique autrement ».
- Affiches de campagne « Construire le numérique autrement » déclinées par thématique (droit à la déconnexion, etc.).
Des outils pour gagner des avancées dans les négociations
- Un Guide du droit à la déconnexion.
- Un guide et une formation pour les négociateurs et négociatrices QVT, disponible septembre 2017.
- Guide forfait jours pour les syndicats, intègrant les modifications de la loi Travail, disponible novembre 2017.
Des outils pour permettre aux ICT d’être « Professionellement engagés et socialement responsables » dans la mise en œuvre des changements
- Un guide pour les cadres et managers de proximité, disponible novembre 2017
- Un guide RH de proximité, disponible novembre 2017.
Des outils pour mettre le web au service des salarié-es
L’application « Ma pointeuse perso » doit permettre aux salarié-es qui le souhaitent de décompter leur temps de travail en lien avec un système de géolocalisation, et ainsi d’avoir un point d’appui pour exiger réduction du temps et de la charge de travail et paiement du temps de travail réellement effectué. Disponible septembre 2017.
La révolution numérique, en ouvrant une nouvelle ère, nous offre l’opportunité de revisiter et réinterroger : notre modèle de production, notre modèle de management, notre rapport au travail, notre modèle d’organisation du travail.
Utilisons la révolution numérique pour ouvrir de nouveaux horizons et changer de cap par rapport aux modèles économiques archaïques des entreprises, pour changer les logiques managériales, et le modèle capitaliste.
Le degré de réussite de la transformation numérique des entreprises et des administrations sera étroitement lié à la façon dont les salarié-e-s, l’encadrement et le syndicalisme, pèseront sur la définition et à la conduite des projets de transformation.
Afin de réussir à obtenir et maintenir la cohésion sociale dans un contexte évolutif et potentiellement disruptif, les transformations numériques ne doivent pas être imposées d’en haut et guidées par une logique de coût, mais débattues et construites collectivement avec les forces sociales et citoyennes dans un objectif de progrès social et environnemental.
C’est possible en permettant à l’encadrement d’être « professionnellement engagé-e-s et socialement responsables ». C’est l’objectif de la campagne « Construire le numérique autrement ».